Jean-Marie Runiga[1] a été arrêté le dimanche 17 mars à Kigali[2],
après avoir été délogé de son fief par la faction rivale du M23 sous
les ordres du colonel rebelle Sultani Makenga. Quant au général rebelle
Bosco Ntaganda[3],
un proche du criminel Laurent Nkunda, il s’est réfugié le lundi 18 mars
dans les locaux de l’ambassade américaine à Kigali où il a demandé à
être transféré à La Haye pour y être jugé[4].
La neutralisation de Jean-Marie Runiga et de Bosco Ntaganda fait de
Sultani Makenga, dont les troupes contrôlent désormais de la localité de
Kibumba (à 30 km de Goma), le chef incontesté du M23 nouvelle version.
En tout cas, près de 600 rebelles, censés être des Congolais, fuyant des combats dans l’Est de la République Démocratique du Congo ont trouvé refuge au Rwanda voisin depuis le vendredi 15 mars. D’aucuns pensent qu’il s’agit d’une opération menée à dessein, une simple diversion pour exfiltrer les militaires rwandais qui combattaient officieusement dans la région du Kivu.
D’abord sous la direction de l’ex-colonel Sultani Makenga, puis de Bertrand Bisimwa qui a succédé à Jean-Marie Runiga, ils reprochent au président congolais, Joseph Kabila, ne pas avoir tenu ses promesses. Ainsi réclament-ils, plus précisément, l’application de l’accord signé le 23 mars 2009 ayant trait au retour des réfugiés congolais basés au Rwanda, à une bonne démocratie et à la confirmation des grades des éléments du CNDP intégrés dans l’armée nationale congolaise.
En tout cas, en ayant chassé Bosco Ntaganda et Jean-Marie Runiga de la région du Kivu, Sultani Makenga
est tombé dans le piège mortel tendu par la communauté internationale.
En effet, il a inconsciemment fait le sale boulot à la place des forces
onusiennes et des FARDC. Dans pareille circonstance, Kinshasa n’a aucun
intérêt à renouveler une expérience qui lui a déjà été fatale. Plutôt
que de sombrer dans les erreurs du passé en composant avec la nouvelle
version du M23, les autorités congolaises doivent doter les FARDC de
moyens conséquents afin de mener une offensive foudroyante contre ces
mutins, plus que jamais isolés, dont les parrains sont désormais liés
par l’accord-cadre d’Addis-Abeba. Ainsi le gouvernement
congolais doit-il façonner l’argile pendant qu’elle est encore humide.
Sinon, le peuple congolais martyrisé ne comprendra pas que la victoire
finale, qui plus est au bout du canon, lui échappe une fois de plus.
Gaspard-Hubert Lonsi Koko
Source : Jolpress
Notes :
[1] Président politique du M23, Jean-Marie Runiga a été démis de ses fonctions soi-disant pour avoir volé des fonds et soutenu une faction loyale à Bosco Ntaganda. Il est recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour le meurtre de civils lors d’un précédent soulèvement.
[2] Une soixantaine d’hommes de troupes ont été publiquement désarmés avant d’être acheminés dans des camps militaires rwandais, entre autres à Kibumba. Cette débandade a été précédée des affrontements très violents, où les hommes de Bosco Ntaganda ont perdu 150 hommes et ceux de Makenga une cinquantaine. Quant aux officiers – les colonels Baudouin Ngaruye, Rwagati, Badege, Muhirwe, Karagwa, Nyabirungu – ayant accompagné Jean-Marie Runiga dans sa fuite, ils ont été accueillis par leurs homologues rwandais avant d’êtré acheminés à Gisenyi par l’armée rwandaise.
[3] Soupçonné par le gouvernement congolais d’être à la tête du mouvement rebelle M23, Bosco Ntaganda, surnommé « Terminator », fait l’objet depuis 2006 de deux mandats d’arrêts de la CPI pour des crimes contre l’Humanité et des crimes de guerre : notamment l’enrôlement d’enfants soldats et des viols, commis dans les régions de l’Ituri et du Kivu au début des années 2000.
[4] Washington a pris contact avec la CPI et avec le gouvernement rwandais pour faciliter cette demande, a précisé Victoria Nuland, porte-parole du Département d’État.
Des fâcheux précédents
Le scénario auquel on est en train d’assister s’est déjà produit en 2009 lorsque Laurent Nkunda avait été arrêté à Kigali, après avoir été pourchassé par la faction dissidente du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) dirigée par son chef d’État-major Bosco Ntaganda qui, de facto, était devenu l’allié de Kinshasa. Aujourd’hui, Laurent Nkunda vit paisiblement à Kigali qui refuse de l’extrader vers Kinshasa. D’autres criminels ayant tristement sévi au sein du CNDP – dont Jules Mutebusi – se sont réfugiés au Rwanda où ils circulent en toute liberté. Le même privilège sera-t-il réservé à Jean-Marie Runiga ? Sultani Makenga deviendra-t-il le nouveau cheval de Troie, à l’instar de son prédécesseur Bosco Ntaganda ?En tout cas, près de 600 rebelles, censés être des Congolais, fuyant des combats dans l’Est de la République Démocratique du Congo ont trouvé refuge au Rwanda voisin depuis le vendredi 15 mars. D’aucuns pensent qu’il s’agit d’une opération menée à dessein, une simple diversion pour exfiltrer les militaires rwandais qui combattaient officieusement dans la région du Kivu.
Du CNDP au M23
Les éléments du M23 sont issus du CNDP de Laurent Nkunda, une ancienne rébellion qui avait été montée de toutes pièces par les Tutsis avec la bénédiction de Kigali dans l’optique de déstabiliser la région du Kivu et d’infiltrer les institutions étatiques. Ces mutins – qui ont été intégrés, après la mascarade de l’arrestation de Laurent Nkunda à Kigali, dans l’armée nationale congolaise depuis le 23 mars 2009 – s’opposent aux Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), depuis mai 2012, dans le Nord-Kivu frontalier du Rwanda et de l’Ouganda.D’abord sous la direction de l’ex-colonel Sultani Makenga, puis de Bertrand Bisimwa qui a succédé à Jean-Marie Runiga, ils reprochent au président congolais, Joseph Kabila, ne pas avoir tenu ses promesses. Ainsi réclament-ils, plus précisément, l’application de l’accord signé le 23 mars 2009 ayant trait au retour des réfugiés congolais basés au Rwanda, à une bonne démocratie et à la confirmation des grades des éléments du CNDP intégrés dans l’armée nationale congolaise.
Et après ?
Le rapport des forces est en train de changer dans la région du Kivu. Assiste-t-on à la réunification du M23 et son enracinement dans le vaste fief sous l’occupation des troupes de Sultani Makenga ? Cet avantage acquis sur le terrain poussera-t-il le nouvel homme fort du M23 à imposer sa volonté à Kinshasa, en obligeant le gouvernement congolais à signer un accord dans le prolongement des pourparlers de Kampala, au risque de s’installer pour très longtemps dans la partie conquise ? On n’est pas loin de penser qu’avec l’avènement de Sultani Makenga, si l’on n’intervient pas très vite militairement, on cautionnera soit la matérialisation de la balkanisation de la République Démocratique du Congo, soit la consolidation de l’infiltration des institutions étatiques par des éléments venus d’ailleurs.L'ex-colonel Sultani Makenga |
Gaspard-Hubert Lonsi Koko
Source : Jolpress
Notes :
[1] Président politique du M23, Jean-Marie Runiga a été démis de ses fonctions soi-disant pour avoir volé des fonds et soutenu une faction loyale à Bosco Ntaganda. Il est recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour le meurtre de civils lors d’un précédent soulèvement.
[2] Une soixantaine d’hommes de troupes ont été publiquement désarmés avant d’être acheminés dans des camps militaires rwandais, entre autres à Kibumba. Cette débandade a été précédée des affrontements très violents, où les hommes de Bosco Ntaganda ont perdu 150 hommes et ceux de Makenga une cinquantaine. Quant aux officiers – les colonels Baudouin Ngaruye, Rwagati, Badege, Muhirwe, Karagwa, Nyabirungu – ayant accompagné Jean-Marie Runiga dans sa fuite, ils ont été accueillis par leurs homologues rwandais avant d’êtré acheminés à Gisenyi par l’armée rwandaise.
[3] Soupçonné par le gouvernement congolais d’être à la tête du mouvement rebelle M23, Bosco Ntaganda, surnommé « Terminator », fait l’objet depuis 2006 de deux mandats d’arrêts de la CPI pour des crimes contre l’Humanité et des crimes de guerre : notamment l’enrôlement d’enfants soldats et des viols, commis dans les régions de l’Ituri et du Kivu au début des années 2000.
[4] Washington a pris contact avec la CPI et avec le gouvernement rwandais pour faciliter cette demande, a précisé Victoria Nuland, porte-parole du Département d’État.
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