Des avis très partagés
En République Démocratique du Congo, les avis sont nettement
partagés entre les différents acteurs politiques et membres de la société
civile sur la signature de cet accord de paix. Pour les uns, ce texte reste
l’une de solutions aux problèmes de sécurité que connaît la région du Kivu. Pour d’autres, il est question de la
mise en cause de la souveraineté nationale
pourtant garantie par le droit international. Quelques observateurs
s’interrogent plutôt sur la mise en œuvre du texte signé Addis-Abeba, en se
demandant si ce processus de paix aidera la région à sortir de la crise ou
restera une énième résolution sans conséquence concrète sur le terrain.
En principe, les Chefs d’État de tous les pays frontaliers
de la République Démocratique auraient dû parapher l’accord d’Addis-Abeba.
L’absence des présidents de l’Ouganda, l’un des pays agresseurs, et de
l’Angola, l’une des puissances militaires régionales, ne peut que confirmer
l’inquiétude de ceux qui s’interrogent sur l’impact réel de cet accord.
L’Ouganda, déçu par le fiasco des pourparlers de Kampala,
s’est volontairement inscrit aux abonnés absents. Ayant soutenu les
revendications du M23, il ne pouvait en aucun cas cautionner un texte qui
hypothèque les visées « balkanistes » de ses poulains. Quant à
l’Angola, pays qui tient à s’imposer comme puissance incontournable en Afrique
centrale, la stabilité de la République Démocratique du Congo finira par
confirmer la position géostratégique de Kinshasa. Ainsi le gouvernement
congolais, une fois son pays pacifié, voudra régler le contentieux pétrolier qui
l’oppose au gouvernement angolais.
Le Rwanda, reconnut par toutes les institutions
internationales comme étant le principal agresseur de la République
Démocratique du Congo, ne pouvait pas se permettre de boycotter cette cérémonie.
En ayant signé ledit accord, ce pays espère montrer à la face du monde du monde
sa volonté de contribuer à la paix dans la région du Kivu. De plus, Paul
Kagame, s’il se réjouit de l’échec[3]
des pourparlers de Kampala, ne peut pas s’opposer à la volonté de ses
commanditaires occidentaux. Au-delà de la criante des sanctions, il espère en
réalité rester en bons termes avec Kinshasa qui, nul ne l’ignore, détient le
destin socio-économique du Rwanda.
La réussite de l’accord de paix signé le dimanche 24 février
à Addis-Abeba dépend surtout de la vision que le peuple congolais a de son
pays. Son unité est le facteur déterminant,
pour ce qui est de la stabilité territoriale de la République Démocratique du
Congo. D’aucuns osent espérer que le dialogue inclusif permettra aux
Congolaises et aux Congolais de dépasser leurs divergences, de sceller un pacte
tacite en faveur de la cohésion nationale face à toute agression extérieure et
à toute tentative interne de déstabilisation – l’objectif consistant à mettre
en place des institutions étatiques efficaces et viables. La mayonnaise congolaise devra donc représenter le
ciment du patriotisme congolais,
garant de l’unité nationale et d’une paix interne durable. On ose espérer que le génie congolais parviendra,
enfin, à faire échouer à jamais l’appétit vorace et les velléités
expansionnistes de ceux qui ne rêvent qu’à se servir sur les décombres de ce
beau, riche et majestueux pays.
Gaspard-Hubert Lonsi Koko
[1] Communauté de développement d’Afrique australe.
[2] La force internationale neutre, qui sera composée de
quatre mille soldats, est appelée à démanteler les groupes armés opérant dans
l’Est de la République Démocratique du Congo, notamment les rébellions des
Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) et du M23. Son
déploiement sur la frontière congolo-rwandaise avait été proposé lors du sommet
interministériel des États de la Conférence internationale sur la région des
grands lacs (CIRGL) en mi-juillet 2012 à Addis-Abeba.
[3] En effet, si Yoweri Museveni avait réussi à arracher
un accord entre le M23 et le gouvernement congolais à Kampala, il aurait
confirmé son leadership dans la région des Grands Lacs au détriment du
président rwandais.
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