Les avantages
La signature de cet accord-cadre a mis de facto un terme à la médiation menée par le président ougandais Yoweri Museveni.
Une excellence nouvelle pour Kinshasa, car les pourparlers de Kampala
cachaient un guet-apens que l’on essayait de tendre de manière sibylline
à la délégation congolaise au profit du M23. Ainsi la mise en place d’une brigade d’intervention rapide, sous la direction des forces onusiennes, pourra stabiliser
la région du Kivu en enrayant les cycles de conflit récurrents et les
violences persistantes imposés par des groupes armés tant nationaux
qu’étrangers.
Dans la même optique, le fait de recommander aux
pays régionaux de ne pas héberger, de ne fournir aucune protection de
quelque nature que ce soit aux criminels[2] ne pourra que faciliter l’administration de la justice, grâce à la coopération judiciaire dans la région. Ainsi le Rwanda pourrait-il livrer à la République Démocratique du Congo des criminels tels que Laurent Nkunda, Jules Mutebusi, Bosco Ntaganda…
Les points à clarifier
La clause concernant l’engagement relatif au
renforcement de la coopération régionale, y compris à travers
l’approfondissement de l’intégration économique avec une attention
particulière accordée à la question de l’exploitation des
ressources naturelles, mérite d’être clarifiée. En effet, seules les ressources frontalières seront partagées grâce à l’exploitation commune par des sociétés publiques d’économie mixte.
Par ailleurs, compte tenu des arrière-pensées des dirigeants ougandais, rwandais et burundais, il aurait mieux valu envisager le réaménagement de la CEPGL[3].
De plus, il est trop tôt d’envisager, comme s’il ne s’est rien passé de
dramatique entre la République Démocratique du Congo et ses agresseurs,
la revitalisation de ladite communauté économique.
Les engagements à revoir
L’objectif de cet accord-cadre consiste en principe à permettre au gouvernement congolais de faire régner l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire
et non à le mettre sous tutelle à travers l’ingérence dans ses affaires
intérieures. Il ne revient pas à la communauté internationale d’imposer
la décentralisation à un État souverain. Dans un pays qui ne dispose
pas encore d’une armée performante et républicaine, et dont les
institutions sont encore défaillantes, la décentralisation non maîtrisée
ne peut qu’aboutir à un démembrement. Or, nul n’ignore que les
agresseurs de la République Démocratique du Congo encouragent des
initiatives allant dans ce sens pour imposer leurs poulains,
c’est-à-dire les rebelles du M23, dans l’administration de la région du
Kivu en vue d’une autonomie ultérieure.
Dans le même ordre d’idées, la promotion de la
réforme structurelle des institutions étatiques – y compris la réforme
des finances – relève de la seule compétence du Parlement national et
non du ressort de la communauté internationale mais.
Le toilettage du texte
Les parlementaires congolais auraient dû être saisis avant la signature de cet accord-cadre. Comme cela n’a pas été le cas, les
commissions de la défense et des affaires étrangères des chambres haute
et basse du Parlement congolais devront se réunir dans l’urgence pour
amender les clauses qui portent atteinte à la souveraineté de la
République Démocratique du Congo. C’est la seule façon de rendre
juste et parfait ce texte signé à Addis-Abeba qui, grâce à son caractère
international, a une valeur supranationale sur les lois étatiques. Si
jamais il n’est pas toiletté, cet accord-cadre incarnera le cheval de Troie qui minera à moyen terme l’État congolais.
Gaspard-Hubert Lonsi Koko
Source : Jolpress
Notes :
[1]
En présence des présidents de la République Démocratique Congo, du
Congo-Brazzaville, du Rwanda, de l’Afrique du Sud, du Mozambique du
Sud-Soudan et de la Tanzanie.
[2]
Plus précisément les personnes accusées de crimes de guerre, de crimes
contre l’humanité, d’actes de génocide ou de crimes d’agression, ou les
personnes sous le régime de sanctions des Nations Unies.
[3] Communauté économique des pays des grands lacs.
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