Œil d’Afrique : Certaines personnes, au sein de la
diaspora congolaise, vous reprochent d’avoir répondu favorablement au dialogue
national voulu par Joseph Kabila et d’activer vos puissants réseaux pour que
les Congolais de l’étranger y participent. Qu’en pensez-vous ?
Gaspard-Hubert Lonsi Koko : Personne n’a le monopole de la diaspora. Et tous
les Congolais de l’étranger ne sont pas de moutons. La diversité de la diaspora
congolaise exclut naturellement le règne de la pensée unique, de l’insulte,
d’une quelconque fatwa et de la dictature que tout démocrate doit en principe
combattre.
Quelques Congolais estiment que le dialogue inclusif proposé
par le président Kabila ne les concerne pas, et c’est leur droit le plus
absolu. On doit le respecter. A contrario, d’autres accueillent favorablement
l’initiative présidentielle dans l’espoir de mettre un terme à la crise
politique qui hypothèque l’avenir de la République Démocratique du Congo. On
leur doit aussi du respect. Seule la finalité donnera raison, ou tort, aux uns
et aux autres.
Je suis de ceux qui espèrent contribuer, lors de ces
assises, à la mise en place des institutions viables, ainsi qu’à l’organisation
des élections transparentes et crédibles. Il est vrai que nous avons agi
discrètement, grâce au lobbying, en faveur de la participation du président de
la République Française, François Hollande, au sommet de la Francophonie qui
s’est tenu en octobre dernier à Kinshasa. Nous avons aussi œuvré en vue du
changement du mandat de la Monusco et de la mise en place d’une brigade
d’intervention afin de stabiliser la région du Kivu. Nous nous activons
davantage, par patriotisme, pour qu’un terme soit mis à la dramatique situation
dans laquelle se trouve le peuple congolais. Notre souhait, à propos du
dialogue inclusif que nous souhaitons républicain, ne concerne nullement le
partage du pouvoir. Il a plutôt trait au renforcement de la cohésion nationale,
de la pacification et de l’unité du pays. Est-ce cela que l’on me
reproche ? Seul quelqu’un qui n’aime pas le Congo peut contester une telle
démarche.
Œil d’Afrique : Quel est votre avis sur les
pourparlers de Kampala, entre le gouvernement congolais et les rebelles du M23
?
G-H. L. K. : Je
suis conscient du fait que la politique a horreur du vide. J’étais favorable à
la participation de la délégation gouvernementale aux pourparlers de Kampala
non pas pour s’aligner sur les positions du M23 et de ses parrains, mais pour
les mener en bateau et externaliser la rencontre. Cet objectif a été atteint,
car les décisions les plus importantes ont été prises à Addis-Abeba et à New
York.
Œil d’Afrique : Et pourquoi les retrouvailles entre
les deux parties en conflit ?
G-H. L. K. : La
signature de l’accord-cadre d’Addis-Abeba et la mise en place de la brigade
d’intervention ont signifié l’échec de la médiation ougandaise dans le cadre de
la CIRGL. De ce fait, le gouvernement congolais s’est retrouvé en position de
force par rapport au M23. Retourner à Kampala, au moment où le M23 est
affaibli, ne peut que paraître incompréhensible. De plus, vu le caractère
supranational des décisions prises par l’Union africaine et le Conseil de
sécurité des Nations Unies, il ne revient plus au président Yoweri Museveni
d’arbitrer quoi que ce soit. La délégation gouvernementale devra donc signifier
au médiateur ougandais que la République Démocratique du Congo souhaite la
nomination d’un Haut représentant des Nations Unies pour superviser l’articulation
de l’accord-cadre d’Addis-Abeba et la mise en place d’une institution, dans le
cadre du mécanisme du suivi régional, en mesure de sanctionner les éventuels
manquements de la part des contractants. Il est hors de question que ces
retrouvailles servent à régler des problèmes congolo-congolais, lesquels
doivent être évoqués à Kinshasa dans un cadre inclusif.
© Œil d'Afrique
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