Les
députés et les sénateurs congolais réunis il y a quelques jours
en commission paritaire, à la suite de l’amendement par le Sénat
de l’article 8 du projet gouvernemental
tendant à modifier la loi N° 06/006 du 9 mars 2006 telle que
modifiée par la Loi N° 11/003 du 25 juin 2011, ne se sont
finalement pas prononcés sur le dispositif à l’origine des
manifestations qui auraient occasionné plus ou moins 42 personnes en
République Démocratique du Congo. En effet, le président de la
Chambre basse, Aubin Minaku, a pris le devant en déclarant que « le
point de vue que l’Assemblée nationale [défendait] devant la
commission [était] celui du retrait de l’alinéa contesté ».
Le
mécontentement du souverain primaire
Dans un
pays où l’écrasante majorité parlementaire, qui plus est acquise
au pouvoir en place, impose systématiquement l’adoption des textes
favorables aux intérêts de la seule mouvance présidentielle à une
opposition institutionnelle très désunie, la vraie contestation ne
peut se matérialiser qu’à l’extérieur de l’enceinte
parlementaire. En tant que souverain primaire, le peuple congolais,
resté très longtemps indifférent aux divergences de la classe
politique, a enfin pris la résolution de descendre dans la rue.
Ainsi a-t-il manifesté, pendant plus de trois jours, son
mécontentement au regard d’un projet de loi inique qui, s’il
était adopté tel que présenté en première lecture à l’Assemblée
nationale, aurait porté atteinte à quelques dispositifs
constitutionnels et muselé la démocratie. Cette courte et intense
bataille extra-parlementaire a fini par stopper les velléités peu
orthodoxes de la majorité présidentielle, au point de retirer le
projet de loi électorale initié par le gouvernement.
Volonté
d’apaisement ou manœuvre politicienne ?
Faudrait-il
considérer le retrait du dispositif litigieux, par le président de
l’Assemblée nationale, comme une réelle volonté d’apaisement
ou un simple stratagème pour gagner davantage du temps ?
A défaut d’imposer sa volonté à la rue, après avoir laminé
l’opposition à l’Assemblée nationale, la majorité
présidentielle a vite saisi au bon l’opportunité offerte par les
sénateurs pour se conformer illico
presto
aux attentes des populations en proie à la colère. Force est de
constater que l’épreuve de force engagée par la rue a sauvé la
face à l’opposition institutionnelle, qui s’est précipitée de
crier victoire, ainsi qu’à une majorité gouvernementale
soi-disant soucieuse de l’unité nationale.
En tout
cas, le
dispositif supprimé, qui liait le recensement de la population à
l’élection présidentielle de 2016, constituait dans l’absolu un
subterfuge censé permettre au président Joseph Kabila de se
maintenir au pouvoir sans modifier la Constitution qui limite à deux
le mandat présidentiel.
La
voix des députés primant en dernier ressort sur celle des
sénateurs, le texte final a été voté en seconde lecture le 25
janvier par la Chambre basse, en session extraordinaire, en vue d’une
éventuelle promulgation par le magistrat suprême. Ainsi revient-il
aux Congolaises et aux Congolais de réagir massivement, avec force
et vigueur, en faveur de sa non-promulgation par le président de la
République Démocratique du Congo.
L’arbre
et la forêt
En
réalité, l’alinéa 3 de l’article 8 du projet de loi électorale
n’est que l’arbre qui cache l’immense forêt congolaise. En
effet, le fait d’avoir exclu du texte gouvernemental l’adéquation
entre le recensement de la population et la tenue de l’élection
présidentielle ne garantit en rien l’égalité de tous les
Congolais en matière de représentativité politique. En effet, les
dispositifs discriminatoires contenus dans le texte soumis au vote du
Parlement ne sont toujours pas supprimés. Le fait de conditionner
une candidature au niveau d’étude, ou alors à une expérience
professionnelle, laisse-t-il supposer que le corps électoral devra
avoir les mêmes compétences que les candidats ? Par ailleurs,
le fait d’imposer plus de 100 000 USD à la candidature à
l’élection présidentielle signifie-t-il dire que seuls les nantis
sont habilités à aspirer à la magistrature suprême ? Bref,
seule la capacité du portefeuille confère-t-elle les qualités
idoines pour la place qu’il faut ?
Le
projet gouvernement
modifiant la loi N° 06/006 du 9 mars 2006, telle que modifiée par
la Loi N° 11/003 du 25 juin 201, reste tout à fait injuste. Il ne
fait que renforcer l’inégalité des citoyens au regard des Lois de
la République Démocratique du Congo.
La
dignité d’un peuple et la grandeur d’un pays
Rien
n’est plus injuste que lors la loi génère elle-même des
injustices. Ayant à l’esprit ce postulat juridique et au vu des
arguments évoqués supra,
les Congolais, de l’intérieur comme de l’extérieur, ont grand
intérêt à maintenir par tous les moyens – pacifiques,
diplomatiques, lobbying – une pression citoyenne afin de venir à
bout d’un régime aux abois retranché désespérément derrière
une muraille, assiégée de partout, qui est en train de s’écrouler
tel un château de cartes. Ils sont contraints de rester debout, unis
par le sort et dans l’effort pour la souveraineté. Ils doivent
enfin dresser leurs fronts longtemps courbés et prendre pour de bon
le plus bel élan dans la paix afin de bâtir un pays plus beau
qu’avant et davantage démocratique.
Mu par
un patriotisme enfin conscient, se laissant guider par l’intelligence
et soutenu par les forces de l’esprit, le peuple congolais, qui
plus est le souverain primaire, doit surtout façonner l’argile
pendant qu’elle est encore humide. C’est le prix de sa dignité
et de son devenir, ainsi que de la grandeur de la République
Démocratique du Congo. Congolais telema !(*)
Gaspard-Hubert
Lonsi Koko
(*) Debout Congolais !
(*) Debout Congolais !
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